
Il y a des jeux qui vous happent dès la première image, qui dégagent une aura si singulière qu’on comprend instantanément qu’ils marqueront une génération. Absolum est de ceux-là. Développé par Guard Crush Games en collaboration avec Supamonks et édité par Dotemu, le titre s’impose comme une fusion magistrale entre le beat ’em up traditionnel et le roguelite moderne. Ce mariage entre action pure et progression permanente donne naissance à une expérience aussi viscérale qu’addictive, sublimée par une direction artistique d’une beauté à couper le souffle.
Dès le lancement, le ton est donné. On pénètre dans le royaume brisé de Talamh, un monde rongé par la magie dévastatrice du tyran solaire Azra. On incarne un groupe de rebelles décidés à renverser cet empire corrompu, en affrontant les gardiens et les créatures qui le protègent. Chaque héros possède sa propre personnalité et son propre style de combat, qu’il s’agisse de Galandra, la fine bretteuse au sens de l’honneur tranchant, de Karl, le nain armé jusqu’aux dents, ou de Brome, le mage amphibien à l’ironie acide. L’univers ne se contente pas d’être un prétexte à l’action : il vit, respire, et raconte quelque chose. La narration reste subtile, jamais bavarde, mais le joueur découvre au fil des niveaux des fragments d’histoire, des symboles, des traces d’un passé déchu qui donnent corps à l’ensemble.
Sur le plan visuel, Absolum atteint une perfection rare. C’est une lettre d’amour à la 2D traditionnelle, une célébration du dessin animé en mouvement. Les animations sont d’une fluidité irréprochable : chaque coup, chaque saut, chaque esquive est illustré avec une grâce et une énergie incroyables. Les personnages se déforment légèrement sous l’impact, les effets de lumière subliment la scène, et chaque décor est une œuvre d’art à part entière. Les forêts bruissent, les ruines suintent la mélancolie, les catacombes s’éclairent d’éclats de magie rougeoyante. Rien n’est figé : tout semble respirer. Même sur Nintendo Switch, le jeu tourne avec une fluidité exemplaire, sans jamais sacrifier la richesse graphique. C’est un exploit technique, mais surtout artistique : chaque plan est digne d’un tableau animé.

Mais Absolum ne se contente pas d’être beau : il est aussi passionnant à jouer. Le gameplay repose sur une base de beat ’em up classique (enchaînements, contres, esquives millimétrées) enrichie d’une dimension roguelite particulièrement bien pensée mais qui ne peut m’empêcher de penser que la durée de vie est virtuellement allongée de la sorte.
Chaque run est différente, chaque échec une opportunité d’apprendre et de revenir plus fort. On débloque de nouvelles compétences, des reliques, des améliorations qui transforment radicalement la manière d’aborder les affrontements. Là où beaucoup de jeux du genre tombent dans la répétition, Absolum parvient à maintenir une tension et une variété constantes. La construction des niveaux, semi-aléatoire, assure une redécouverte permanente : on explore des routes différentes, on choisit des itinéraires alternatifs, et on sent à chaque fois que l’on progresse. Et surtout, on a grand plaisir à revenir dans ces décors somptueux soutenus par des animations exceptionnelles et une bande-son incroyable. Pour moi, la référence directe, c’est Guardian Heroes et ses inombrables chemins que l’on reparcourait encore et encore sans aucun déplaisir. Mais les plus anciens auront sans doute aussi relevés de solides clin d’oeil en direction de Golden Axe avec les montures et les petits farfades qu’il faut taper pour récupérer des piecettes.

Les combats, quant à eux, sont un modèle d’équilibre. Rapides, précis, intenses, ils reposent sur un système de timing parfaitement calibré. Les coups légers se combinent avec des attaques lourdes et des techniques spéciales qui remplissent l’écran d’effets spectaculaires. Le tout répond au doigt et à l’œil, sans latence, avec une précision de gameplay rarement atteinte dans le genre. L’esquive parfaite, qui déclenche un contre surpuissant, procure une sensation de puissance grisante. Les boss, eux, demandent observation, stratégie et maîtrise : aucune victoire ne s’obtient par hasard, chaque affrontement se mérite. Et quand on perd, ce n’est jamais frustrant : on sait pourquoi, et on a envie d’y retourner immédiatement.
Le jeu gagne encore en intensité lorsqu’on y joue à deux. En local ou en ligne, Absolum devient une véritable symphonie d’action coopérative. Chacun des deux joueurs peut développer son propre style, ses propres améliorations, et l’alchimie des coups portés en duo donne lieu à des moments d’anthologie. Le jeu parvient à conserver sa lisibilité même au cœur du chaos le plus total, un exploit compte tenu de la densité visuelle.

La bande-son, elle, mérite tous les superlatifs. On passe de thèmes orchestraux majestueux à des mélodies plus mélancoliques, soutenues par des percussions tribales et des chœurs mystiques. Chaque morceau semble épouser l’état émotionnel du joueur : tension, fureur, espoir, ou relâchement. Les sons d’impact sont nets, précis, percutants ; la spatialisation est impeccable, et les doublages nombreux et expressifs ajoutent un supplément d’âme. Le mixage audio donne cette impression rare que chaque son a été pesé, pensé, et intégré dans une composition d’ensemble. On ne joue pas seulement à Absolum : on l’écoute, on le ressent, on le vit.
Au-delà de sa technique, c’est le rythme global qui impressionne. Absolum ne s’essouffle jamais. Chaque run, chaque combat, chaque découverte garde une intensité intacte. Le système de progression est calibré pour donner envie de s’améliorer, pas pour forcer le joueur à recommencer. On ressent une vraie montée en puissance, un accomplissement naturel. Le jeu a cette magie rare de donner le sentiment que l’on grandit avec lui.
Certains pourront reprocher un apprentissage un peu abrupt : j’avoue ne pas avoir été passionné par les items et l’arbre de progression accompagnés d’informations en quantité (beaucoup de lecture qui dénote du côté 100% action que requiert ce genre de titre). Mais cette lourdeur se fond vite dans l’expérience globale, tant l’ensemble est cohérent et passionnant. Absolum est un jeu de conviction, de passion, fait par des gens qui aiment profondément ce qu’ils font, et cela se sent à chaque instant.
Au final, Absolum est un joyau. Un chef-d’œuvre de 2D moderne qui allie élégance visuelle, profondeur de gameplay et intensité émotionnelle. C’est un jeu qui respire la maîtrise, le respect du joueur, et la joie du jeu pur. En solo comme en coop, on enchaîne les sessions avec le même plaisir, sans jamais ressentir la lassitude. C’est un titre qui honore la tradition tout en regardant vers l’avenir, une œuvre capable de séduire aussi bien les nostalgiques des grandes heures de l’arcade que les amateurs de sensations neuves et exigeantes.

Sur Nintendo Switch, Absolum est une claque visuelle et sensorielle. Un condensé de tout ce que le jeu vidéo 2D peut offrir de meilleur. Il ne se contente pas d’être un excellent roguelite : il redéfinit ce qu’un beat-them-all moderne peut être. Si vous aimez les jeux qui ne trichent pas, les aventures qui vibrent, les univers qui respirent la passion, alors Absolum est fait pour vous. C’est, sans exagération, l’un des plus grands jeux de l’année, un titre qu’on finit le sourire aux lèvres, et qu’on relance immédiatement, juste pour le plaisir d’y être à nouveau.
Je suis cependant bien conscient que ce jeu n’est pas fait pour tout le monde et que le côté Roguelite pourra rebuter de nombreux joueurs. Sachez cependant que je ne suis pas non plus un grand fan du genre et que j’aurais sans doute préféré un beat-them-all pur et dur mais que je n’ai pas renoncé pour autant aux délices d’Absolum.




