Dragon Age: The Veilguard
Dans les terres tourmentées de Thédas, un nouveau chapitre s’ouvre enfin. Après une attente interminable de neuf longues années, Dragon Age : The Veilguard surgit des brumes du temps, tel un phénix renaissant des cendres d’Inquisition. Mais ce phoenix a-t-il retrouvé son plumage d’antan, ou n’est-il qu’un pâle reflet de la gloire passée ?
Dragon Age : The Veilguard, suite directe de Dragon Age : Inquisition, fait son apparition sur PC, PS5 et Xbox Series après une longue période de développement. Ce nouvel épisode de la franchise emblématique de BioWare suscite de nombreuses attentes, notamment quant à sa capacité à égaler le succès unanime du premier opus, Dragon Age : Origins
Neuf années se sont écoulées depuis la sortie du dernier DLC de Dragon Age Inquisition, une attente considérable pour les fans de la série, particulièrement au vu des révélations du DLC « L’Intrus » et de sa conclusion laissant la porte ouverte à toutes les interprétations. Le développement de Dragon Age : The Veilguard a été marqué par de nombreuses difficultés, notamment en raison de la concomitance avec d’autres projets majeurs de BioWare tels que Mass Effect : Andromeda et Anthem. Le départ fin 2022 de Mac Walters, directeur de production du jeu, a suscité des inquiétudes de la part des joueurs sur l’avenir du titre.
Mais voici enfin le fruit de cette longue attente ! The Veilguard est-il le messie tant attendu, capable de faire l’unanimité comme Origins quinze ans auparavant ? BioWare réussit-il à effacer une décennie de traversée du désert ? La réponse, chers aventuriers, n’est pas aussi éclatante qu’on l’aurait souhaité…
Le récit débute là où l’extension « L’Intrus » s’était arrêtée, révélant que Solas, un personnage intriguant, est en fait Fen’Harel, un dieu elfique désireux de déchirer le Voile pour ressusciter l’immortalité de son peuple. Cependant, son plan néfaste pourrait plonger le monde dans le chaos, justifiant l’intervention du joueur, incarnant Rook, aux côtés de Varric, pour le stopper.
La structure narrative de The Veilguard s’efforce de captiver les joueurs avec une ouverture directe. Malheureusement, après cette introduction prometteuse, le scénario connaît un ralentissement notable. Les missions dispersées à travers les factions du nord de Thédas, visant à récupérer sept compagnons, n’arrivent pas à maintenir l’intérêt des joueurs car trop déséquilibrée en rythme. L’histoire ne retrouve un attrait suffisant que lorsque l’équipe est assemblée, mais manque cruellement de moments intenses.
L’absence d’interactions profondes entre les peuples de Thédas laisse un goût amer aux nostalgiques d’Origins. Plus frustrant encore, Solas, pourtant élément principal de l’histoire, reste trop souvent dans l’ombre. Pourquoi avoir relégué au second plan ce personnage si charismatique ? BioWare aurait-il sous-estimé l’attachement des joueurs à l’ancien allié de l’Inquisiteur/trice ?
Néanmoins, les apparitions de Solas, bien que trop rares, sont remarquables. Son flegme, sa condescendance et son éloquence, particulièrement dans la version française, font de lui un personnage plus charismatique que jamais. Ses interventions, ainsi que les discussions d’équipe, parviennent à recréer l’atmosphère caractéristique de Dragon Age. Les dernières heures de jeu replacent Solas au cœur de l’intrigue, une approche qui aurait gagné à être adoptée tout au long de l’aventure.
L’épilogue laisse une impression similaire à celui d’Inquisition : une impatience pour une suite qui pourrait servir de point culminant à la saga, après une conclusion si marquante. Ce constat souligne une certaine frustration quant au développement narratif de The Veilguard.
The Veilguard marque un retour aux sources en termes de structure, abandonnant les zones semi-ouvertes d’Inquisition au profit d’une approche plus linéaire/couloir. Cependant, bien que l’idée fût bonne sur le début, cette linéarité s’avère excessive. Les environnements urbains et les donjons sont extrêmement cloisonnés. La verticalité et la présence de quelques éléments d’exploration secondaires ne suffisent pas à compenser ce manque d’ouverture. Cette restriction est symbolisée par l’impossibilité pour le personnage de nager pour explorer les environs.
Les quêtes s’accumulent dans des zones exiguës, provoquant rapidement un sentiment de lassitude. On ne prend guère de plaisir à arpenter ces villes et donjons sans âme, surtout quand les combats s’enchaînent sans répit. Le manque de personnalité des lieux visités n’arrange rien à l’affaire.
Contrairement à Inquisition que j’avais bien apprécié, qui offrait un sentiment prononcé de voyage et de dépaysement malgré ses défauts, The Veilguard échoue à reproduire cette sensation. Le plaisir de découvrir de nouvelles villes, autrefois palpable grâce à leur envergure et leur style distinctif, est ici absent.
Le système de déplacement se limite au voyage rapide ou à l’utilisation de la Croisée des chemins, une zone centrale (Hub) donnant accès aux différents lieux de l’histoire via des portails. Cette approche, bien que pratique, diminue considérablement le sentiment d’exploration et d’immersion dans l’univers du jeu.
BioWare semble avoir cherché à reproduire le level design de Dragon Age Origins, mais omet de prendre en compte l’évolution des attentes des joueurs en quinze ans. La structure datée de The Veilguard contraste défavorablement avec les RPG modernes que nous avons connus. N’aurait-il pas été plus judicieux de trouver un juste milieu entre Origins et Inquisition ? Ou de conserver la formule du dernier opus en l’allégeant de ses quêtes superflues ? pour ma part cela aurait dû être un choix plus judicieux et qui aurait brisé la monotonie du voyage pendant de long moments.
Le système de combat de The Veilguard fait preuve de modernité, se déroulant en temps réel. Le joueur dispose d’une attaque classique, d’une attaque lourde et de trois compétences activables via des raccourcis. L’utilisation de ces compétences est conditionnée par une jauge de rage qui se remplit en attaquant les ennemis. Une attaque ultime, plus puissante, nécessite un temps de charge plus long.
Le jeu intègre également un système d’ébranlement des ennemis, représenté par une jauge qui se remplit au fil des assauts. Une fois pleine, elle permet de déclencher un coup suprême infligeant des dégâts importants. La défense n’est pas en reste, avec l’introduction d’un système de parade et de parade parfaite, s’inscrivant dans la lignée des jeux d’action récents.
La pause active, marque de fabrique de la série depuis Origins, est toujours présente. Elle permet de figer l’action pour sélectionner les compétences à utiliser, tant pour le personnage principal que pour ses alliés. Cette mécanique est particulièrement utile pour déclencher des détonations, effets résultant de la synergie entre certaines compétences.
Le sentiment de puissance qui se dégage des combats est appréciable, s’accentuant à mesure que de nouvelles compétences sont débloquées. L’inspiration tirée de la série God of War est évidente, notamment dans certaines animations et mécaniques de jeu, barre de rage…utilisation de reliques et j’en passe. Cette influence, bien que marquée, n’est pas nécessairement problématique, le résultat étant globalement satisfaisant.
Cependant, le système de combat souffre de plusieurs défauts qui nuisent à l’expérience sur le long terme. Des imprécisions dans le déclenchement de certaines actions, des hitbox parfois mal calibrées et une caméra trop éloignée de l’action rendent la lecture des patterns ennemis et le timing des parades difficiles. Ces problèmes sont exacerbés par la pauvreté du bestiaire, qui recycle fréquemment les mêmes ennemis avec de simples variations esthétiques, un peu comme dans Street Of Rage avec plusieurs couleurs différentes pour symboliser la puissance de l’ennemi.
Après une vingtaine d’heures de jeu, l’enthousiasme initial pour les combats s’émousse. Même en difficulté élevée, les affrontements manquent souvent de défi satisfaisant, se résumant parfois à des confrontations contre des ennemis avec une plus grosse réserve de PV peu inspirés. Ce constat est d’autant plus regrettable que le jeu brille par la qualité de ses animations de combat et son sound design, qui retranscrivent efficacement la puissance des attaques.
Paradoxalement, certains combats censés être épiques perdent de leur impact en raison de l’absence de musique. Malgré la collaboration avec des compositeurs renommés comme Hans Zimmer et Lorne Balfe, la bande-son de The Veilguard se fait étonnamment discrète, ne parvenant pas à sublimer les moments forts du jeu et permettant de rendre hommages aux compositeurs en charge de la BO.
The Veilguard offre un système de progression satisfaisant, permettant une montée en puissance graduelle et perceptible de notre personnage. L’évolution se fait à travers l’acquisition d’expérience en combat et la réussite de quêtes. Chaque classe dispose de trois spécialisations, offrant des orientations de jeu distinctes (Pour ma part j’ai choisi Tranchemort donc orientation dégâts nécrotiques).
L’arbre de compétences est riche, proposant de nombreux bonus passifs et capacités actives à débloquer. Cette structure permet une personnalisation poussée du style de jeu, bien que certains choix classiques, comme l’utilisation d’épées à deux mains pour les Guerriers, soient étonnamment absents.
Les compagnons bénéficient également d’arbres de compétences, quoique moins fournis que celui du protagoniste. L’équipement joue un rôle important dans la progression, avec des armes et accessoires offrant divers modificateurs de statistiques. Le système d’amélioration d’équipement ajoute une couche supplémentaire de personnalisation, permettant de renforcer les attributs existants et d’en débloquer de nouveaux.
Les équipements obtenus durant le jeu pourront aussi être améliorés auprès d’un personnage dans la base principale afin de renforcer la puissance globale de chaque personnage et de dévoiler de nouveaux attributs d’armes verrouillés précédemment et cela coutera évidemment des ressources disséminées partout au fil de l’aventure.
Fidèle à la tradition BioWare, The Veilguard propose un système de dialogues à choix multiples, avec des conséquences plus ou moins significatives. Généralement, trois options de réponse sont disponibles, parfois complétées par une quatrième liée à la faction d’origine du personnage.
Bien que certains choix aient des répercussions importantes, le jeu reste globalement plus linéaire et binaire dans ses embranchements narratifs qu’un titre comme Baldur’s Gate 3 ou même de la trilogie Mass Effect. Les décisions majeures sont souvent présentées de manière trop directe, laissant peu de place à la subtilité ou à l’interprétation.
Le jeu manque d’occasions où la connaissance approfondie du lore ou l’analyse fine de la situation influenceraient significativement les décisions. De même, les opportunités d’utiliser la diplomatie pour éviter les conflits sont rares et qu’est-ce que cela manque, pour ma part cela en est frustrant d’avoir une orientation trop simpliste.
L’impact des choix se manifeste principalement à travers la complétion des quêtes liées aux factions et aux compagnons, influençant leur puissance et leur développement personnel. J’aurais apprécié un peu plus de subtilité dans la manière dont le jeu nous guide vers la « bonne » fin.
La mise en scène de The Veilguard se révèle souvent minimaliste, avec des fins de missions et de dialogues abruptes qui laissent peu de place à l’émotion. Les cinématiques élaborées et bien mises en scène sont rares, se concentrant principalement au début et à la fin de l’aventure.
Cette réalisation en demi-teinte contraste avec le passif de BioWare et les standards actuels du jeu vidéo. Le jeu ne parvient à atteindre son plein potentiel narratif et visuel que dans ses dernières heures, donnant l’impression que l’essentiel de l’expérience se concentre sur la destination plutôt que sur le voyage.
La conclusion de cette histoire arrivera aux alentours de 30-40 heures de jeux et compter environ 50-60 heures pour ceux qui veulent tout trouver et ainsi obtenir les meilleurs résultats pour finir le jeu.
La construction des compagnons reste un point fort de The Veilguard. Chaque allié possède une histoire personnelle complexe, explorée à travers une série de quêtes dédiées. Les dialogues avec les compagnons sont particulièrement réussis, offrant des aperçus profonds de leur passé et de leurs émotions, grâce à la qualité d’écriture caractéristique de BioWare.
Le jeu se montre inclusif dans sa représentation des personnages, reflétant la diversité inhérente à l’univers de Dragon Age. Cependant, certains éléments peuvent paraître anachroniques ou hors contexte dans un cadre d’heroic fantasy.
Les romances, bien que présentes, semblent moins développées que dans Inquisition. Les moments d’intimité avec le partenaire choisi sont moins fréquents, et la progression de la relation peut parfois manquer de cohérence ou de profondeur émotionnelle.
L’éditeur de personnage de The Veilguard est complet, offrant un large éventail d’options pour personnaliser l’apparence de Rook. Les différentes races jouables (Elfe, Qunari, Humain, Nain) et les backgrounds associés influencent subtilement les interactions avec le monde du jeu, bien que cet impact reste limité comparé à d’autres titres du genre.
La direction artistique du jeu a suscité des débats lors de sa révélation, s’éloignant de l’esthétique plus sombre des précédents opus. Dans le jeu final, cette nouvelle approche visuelle s’avère moins choquante qu’anticipé, mais souffre d’un manque d’harmonie qui peut le rendre fade en contraste à d’autre RPG modernes. Les personnages présentent un style réaliste, tandis que les environnements et certains éléments de jeu adoptent une esthétique plus stylisée, rappelant parfois des productions plus cartoonesque de certains jeux.
Sur le plan purement technique, The Veilguard se montre à la hauteur des attentes, avec des modèles de personnages détaillés et des animations faciales de qualité. Les armes et armures bénéficient également d’un traitement soigné, mais je dois admettre que c’est bien la première fois qu’aucune armes ou armures me donne envie d’un point de vue cosmétique. Le jeu tourne sans accroc sur Xbox Series X, que ce soit en mode Fidélité ou Performance.
Dragon Age : The Veilguard représente une étape audacieuse mais difficile pour BioWare. Bien qu’il ne parvienne pas à réitérer l’unanimité critique et publique de Origins, le titre possède malgré tout un charme distinctif qui séduira les fans de la série mais qui manque de liaison, d’harmonie.
La structure du jeu, les environnements linéaires et un système de combat perfectible sont des aspects qui détournent d’une immersion totale pour un jeu avec une longue durée de vie. Cependant, les talents d’écriture et de caractérisation du studio continuent de briller malgré une simplicité prise, mention spéciale à travers la figure magnétique et charismatique de Solas.
En conclusion, si The Veilguard n’atteint pas les hauteurs de ses prédécesseurs, il ouvre la voie à de nouvelles explorations potentielles pour l’avenir de la saga Dragon Age. Les amateurs désireux d’une expérience transcendante devront attendre encore un peu, tandis que ceux appréciant les subtilités narratives et émotionnelles trouveront de quoi nourrir un sens renouvelé de l’épopée dans cet univers fantastique unique. Malgré tout cela le jeu donne plus un effet de déjà-vu quand on regarde les autres productions autour, il manque à ce jeu un « je ne sais quoi » pour lui donner une identité unique pour qu’il se démarque dans le milieu des RPG.
Fidèle à son héritage, Dragon Age : The Veilguard incarne tout autant une promesse qu’un défi pour BioWare. Les prochains chapitres sauront-ils étancher la soif grandissante des aventuriers désireux de grandeur et de passion ? Seul l’avenir pourra répondre à cette question, en espérant une fois encore que le Vent soufflera avec audace sur Thédas.